mercredi 1 juillet 2009

Lapsus linguae

Le professeur Römer du Collège de France fait un magnifique lapsus dans sa leçon inaugurale : Au lieu de remercier "les professeurs qui ont décidé" de son élection, il remercie "les professeurs qui ont décédé", provoquant l'hilarité générale. (Vous pouvez écouter ce lapsus à la minute 5:37 de la conférence vidéo du message "La leçon inaugurale").

Ce lapsus est amusant, parce que effectivement si ce sont les professeurs vivants qui ont décidé de son élection, ce sont en tous cas les professeurs décédés qui l'ont rendue possible, puisque les places au Collège de France se libèrent au fur et à mesure des décès.

En plus, c'est émouvant de la part d'un professeur suisse, dont l'allemand est la langue maternelle, langue dans laquelle a été inventé le concept par Sigmund Freud de "Fehlleistung", l'erreur-performance. Cette erreur performance va beaucoup plus loin que le simple lapsus du latin d'origine, que le Gafiot traduit par "glissement" au sens propre, erreur au sens figuré.
Accessoirement, cela m'a toujours gêné chez Freud, et dans la psychanalyse en général : prendre un fait (un glissement), et lui sur-imposer une signification soit-disant initialement cachée, brutalement révélée. Comme si il n'y avait pas de coïncidence, mais bien plus forts, il n'y aurait que des hasards ; ou comme si les épiphénomènes se devaient de tous être des symptômes.
En fait, c'est une tendance naturelle de la nature humaine, que de vouloir surimposer du sens sur un évènement qui n'en n'a fondamentalement pas : Sur ce principe, les ponts romains sont des chefs-d'oeuvre de construction, la preuve ils sont toujours debouts après 2000 ans. C'est oublier les milliers de ponts romains écroulés et disparus sans laisser de trace.