Un homme arrive un soir tard dans une ville de province, hors saison, et ne trouve pas à se loger. En désespoir de cause, il se résigne à frapper à une porte au hasard, comptant sur la compassion de ses habitants.
Un homme lui ouvre la porte, et lui demande gentiment ce qu’il peut faire pour l’aider.
« Pouvez-vous m’héberger ? je ne trouve pas à me loger ce soir » lui répond l’homme à la rue.
L’hôte, puisque c’est le rôle que cette histoire aimerait bien donner à cet homme qui a un toit, lui demande alors :
« Vous comptez rester chez nous et prendre vos repas avec nous ? »
« Oui, si cela n’est pas trop vous demander ».
« Et après , vous partirez ? »
« Oui, mais je peux payer » répond l’homme sans toit, un peu interloqué.
« Très bien, répond l’hôte, visiblement soulagé, alors je vais vous demander 1000 Euros.»
« 1000 Euros, mais c’est du vol ! »
« 1000 Euros, c’est à prendre ou à laisser. Et s’il vous plaît je vous serais reconnaissant, de bien vouloir me payer d’avance.».
L’autre regarde autour de lui la nuit noire, les maisons closes, et relève son col devant la froidure de la nuit tombée.
« Bon, très bien », et il paye à son hôte les 1000 Euros demandés.
L’homme sans toit est ensuite accueilli avec faste dans la maison, dans une chambre confortable et spacieuse. Il prend des repas de grande qualités, faits de mets fins et de vin raffinés. En plus ses hôtes sont charmants, très attentionnés, et d’une conversation passionnante. Et comme le séjour coûte 1000 Euros, notre homme qui s’est trouvé un toit, n’a aucun scrupule à profiter à plein de tout ce confort, qui après tout lui coûte fort cher.
Le lendemain, au moment de partir, son hôte lui tend un petit paquet, en lui disant :
« Prenez, nous avons coutume d’offrir un petit quelque chose à nos hôtes, afin qu’ils se souviennent de leur séjour parmi nous ».
Le voyageur, un peu narquois lui répond :
« Vous savez, je n’aurai probablement pas besoin de ce petit quelque chose pour me souvenir de mon séjour parmi vous », mais il prend quand même le cadeau, jugeant qu’après tout, pour 1000 Euros, il a aussi droit au petit cadeau.
Petit cadeau qu’il ouvre immédiatement, et dans lequel il trouve … ses 1000 Euros.
Il se tourne interloqué vers son hôte, qui lui répond, un peu gêné :
« Si vous n’aviez pas payé si cher, auriez-vous été prêt à recevoir tout ce que j’avais envie de vous donner ? ».
J’adore cette histoire, que j’ai entendue du Rabbin Lemel, de la synagogue de Cadet, histoire qui parle certes de la générosité de celui qui donne, mais bien plus du courage que représente l’acceptation de l’offrande pour celui qui la reçoit. Pour citer le rabbin (in « les 4 coupes de lait » Editions Lev) :
« Il est tellement difficile d’accepter le don de l’autre. Nous avons tellement peur d’être redevable, nous avons peur d’un sentiment d’infériorité qui altérerait à terme la relation. Cette idée est fausse, mais nous n’avons pas l’obligation de l’enlever de la tête de l’autre. Cependant nous devons en tenir compte afin d’imaginer une autre modalité du don, afin qu’il puisse recevoir ce que nous avons envie de lui donner ».
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