lundi 20 octobre 2025

La captation par l'IA de la valeur ajoutée de l'économie mondiale

Je pensais initialement, comme tous les journalistes passent leur temps à l'écrire, que l'IA allait perturber, peu ou prou, chacun des business-models individuels des différents métiers offerts (autrefois) par notre société moderne.

Avec ma compréhension très limitée de l'IA, je pensais que chaque métier serait perturbé selon un "ratio de perturbation IA" spécifique à ce métier. Je considérais ainsi que :

- Le métier de traducteur interprète à l'ONU aurait (ou a déjà plutôt) un "ratio de perturbation IA" de 100%.

En effet, l'IA étant d'ores et déjà capable d'assurer la totalité des services rendus par le sympathique interprète de l'Italien vers l'Anglais, assis dans sa salle de régie technique de l'ONU. Le ratio de perturbation est donc de 100%.

En plus, et c'est un bénéfice économique pour l'ONU et pour toute la société, le discours du ministre italien à le tribune, en Italien, peut durer deux heures, l'IA ne fatiguera pas et n'aura pas besoin d'être remplacée au bout de 20 minutes, comme l'interprète humain a besoin de l'être.

Evidemment, un ratio de perturbation de 100% sur un métier est synonyme d'une totale annihilation de ce métier ; 100% équivalent à une mort subite de ce métier. Et de fait, c'est fort pénible pour eux, mais les traducteurs interprètes savent bien qu'il leur faut passer à autre chose, s'ils veulent gagner leur vie.

Utilisons l'acronyme "RIP" pour ce "Ratio IA de Perturbation", pour la lisibilité.

- Le métier de radiologue a un RIP de 90%.

Malgré les 30 ans d'expérience de ce vieux radiologue, l'IA détecte d'ores et déjà mieux que lui la caractère malin de la tâche d'une tumeur sur la radiographie, et écarte mieux que lui également ce nodule simplement bénin sur la prochaine radiographie.

Cette IA rend d'ailleurs les conclusions de son anapathe 100,000 fois plus rapidement que l'humain, permettant ainsi une analyse du flux complet de toutes les radioscopies de tous les IRM hospitaliers de France et de Navarre.

Le spécialiste humain conserve 10% de valeur ajoutée à valider et certifier le travail de l'IA, car cette IA n'est encore qu'en période d'essai pour le moment dans ces mêmes centres hospitaliersIl y a fort à parier toutefois que la rétention de ces 10% de valeur ajoutée par l'humain ne soit pas très pérenne.

- Le métier d'avocat a un RIP de 50%

En effet, la moitié du travail d'un avocat a toujours consisté à 50% à rechercher, étudier et synthétiser la jurisprudence existante sur le litige dont on lui a confié la résolution, en préparation de sa future plaidoirieTravail de recherche et de synthèse que l'IA fait beaucoup mieux que lui, et en quelques minutes seulement.

Le métier d'avocat conserve les 50% de valeur ajoutée tirés de la phase plaidoirie elle-même, mais les prix des avocats vont chuter drastiquement, ce dont personne ne se plaindra, sauf eux.

- En généralisant, tout métier de col blanc ou de col bleu dans la société, quel qu'il soit, a spontanément un RIP minimum de 10%, dès aujourd'hui ou à court terme en tout cas.

Cette situation a déjà des conséquences incroyables, notamment sur les jeunes, désireux de rentrer dans un métier hélas à RIP élevé. Inutile pour un jeune de rêver devenir traducteur à l'ONU, inutile de rêver devenir radiologue.

Noter qu'il y a une magnifique justice sociale immanente, douloureuse par ailleurs pour les finances publiques, à RIPer ainsi en priorité des métiers surpayés. 

Et une noblesse certaine de la part de l'IA à préserver au contraire ces métiers extrêmement difficiles et mal payés, en ne leur infligeant qu'un RIP nul.
Le RIP est ainsi nul pour ce métier d'infirmière de nuit à la
Croix-Bleue, cet hospice centenaire au fin fond de l'Aveyron, et la valeur ajoutée humaine y reste de 100% pour les "dames cantinières" :


Mais j'ai affiné récemment ma compréhension du RIP de l'IA sur une catégorie très particulière de métiers, ceux déjà totalement informatisés avant même l'arrivée de l'IA. Comme cas typique de ces métiers particuliers, prenons l'exemple d'une agence de voyages.

Impacts du RIP sur le business model d'un voyagiste ?

Le métier de voyagistes est aujourd'hui 99% informatisé. La valeur ajoutée de l'opérateur humain survivant dans le métier du voyage se réduit déjà à la partie congrue : 
Dans les cas où le voyage s'est mal passé, la valeur ajoutée humaine se réduite au simple support psychologique du client. Et cette valeur ajoutée humaine se réduit, dans tous les autres cas, à l'analyse de l'avis de satisfaction laissé par le client sur Internet.

Dès lors, l'IA aura t'elle encore des conséquences perceptibles sur un métier déjà 99% déshumanisé ? 
Comme les instances professionnelles des voyagistes l'ont bien compris, le business model de ces métiers va être en fait ravagé par l'IA, par une effet de billard à 3 bandes. 

En fait les clients ont déjà commencé à demander à ChatGPT d'organiser leurs voyages pour eux, plutôt que d'aller même sur le site informatique des voyagistes établis.

Quelle différence me direz-vous, à ce que le client utilise un site informatique d'intermédiation à la place d'un autre site informatique d'intermédiation ?

Le problème réside en fait dans le détournement de la relation commerciale qui survient à cette occasion. Si ChatGPT a dorénavant connaissance en premier de la future intention d'achat du voyageur, c'est alors ChatGPT, et non plus ni Experia ni AirBNB ni Air France, qui est en mesure d'assurer la transformation des prix de gros de voyages en prix de détail. 

C'est ChatGPT qui choisit de remplir l'avion d'Air France, plutôt que l'avion d'Ethiad, ou l'inverse. 
C'est ChatGPT qui choisit Paris ou Venise pour y déverser sa cargaison de touristes asiatiques ou américains.

Et c'est donc ChatGPT qui en capte alors la valeur ajoutée monétarisée de ces choix à son profit.

Et cette captation, c'est la mort assurée des voyagistes, et la fortune de ChatGPT.

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