Du coin de l'œil, je vis ce petit garçon s'avancer sur le passage piétons.
Il était très jeune, 4 ou 5 ans, et il faisait des bonds disproportionnés, ce qui énervait sa mère, qui le tenait par la main.
Et je compris instantanément qu'il était comme moi, de ces enfants qui savent que les bandes blanches de caoutchouc sont des iles refuges, et qu'un gouffre insondable et menaçant s'ouvre dans le bitume, dès le bord de la bande blanche.
Arrivé au bord de celle-ci, il prenait son élan, en appui sur la main de sa mère, et bondissait à chaque fois d'une distance que ses 3 pieds de haut ne lui auraient pas permise.
Cela lui donnait cette allure maladroite, comme suspendu un instant au dessus du vide, avant de toucher terre à nouveau, dans la sécurité d'une île.
A l'abri temporaire dans le refuge au milieu de la chaussée (tout de peinture blanche), nos regards se sont croisés, et j'ai souri.
Il a alors su que je savais.
Aujourd'hui que j'ai grandi, il est plus facile pour moi de sautiller discrètement de bande blanche en bande blanche, sans empiéter absolument.
J'évite ainsi facilement de tomber dans le gouffre que je sais là, béant sous nos pieds.
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