mercredi 25 décembre 2013

Alain Fournier


Souvent, une fois revenu rive gauche, je monte par la rue Saint Jacques.
Dans le flot indifférent de la ville moderne, je pense à ces 20 siècles de parisii qui ont avant moi vécu sur ce cardo de la ville.
Déjà dans le faubourg, se trouve un petit immeuble propret. C’est là qu’a vécu Alain Fournier. Je le vois assis sur le bord du Chemin de Compostelle, lorsqu’il écrivit le Grand Meaulnes pour moi.

Ce puissant flot d’images déjà suffirait à nourrir mon imaginaire, mais je me rappelle de plus chaque fois, et avec la même intensité, qu’Alain Fournier est tombé dans la Meuse, dès les premiers jours de la guerre de 14, dans le bois au-dessus de Saint-Remy-la-Calonne.

Et de rage je tends le poing contre cette guerre, qui a fauché Augustin Meaulnes et mille et mille de nos grands oncles, sans leur laisser épouser Mademoiselle de Galais, et sans leur laisser le temps d'écrire une autre histoire de France.

dimanche 1 décembre 2013

Projet 02081914 / La mort du Sapeur Colin


Objet
Voici un exemple de fonctionnement de ce qui va se dérouler lors de recherches sur les soldats individuels de la guerre de 14. Je prends ici l’exemple du Sapeur Colin, qui était un copain de guerre du Grand-Père Emile Gazet (un Doubiste de la même section), et qui a été tué par un obus à Pexonne.

JMO-Wikipedia
Sur le Journal de Marche et des Opérations de la compagnie 21/2, pendant la campagne de France de 1914, j’ai identifié les faits suivants comme importants :



Je les ai retranscrits de manière indexable dans Wikipedia, sur la fiche de la compagnie 21/2 :



Recherche Google
Grâce à l’indexation de Google (qui est mise à jour en instantané, je ne sais vraiment pas comment ils font …), quelqu’un qui fera des recherches sur son aïeul Colin retrouverait facilement cette fiche :


 


Morts pour la France
Et sera ainsi capable de connaitre les circonstances de la mort de son aïeul, qui auparavant n’étaient pas connues (Est simplement référencé « Tué à l’ennemi ») :
 

Je vais d'ailleurs également mettre à jour la fiche du Sapeur Colin, dans le cadre de la démarche participative du site Mémoire des Hommes. 

 Et la prochaine fois que vous passez à Bethoncourt, le village du Sapeur Colin, dans le Doubs, un nom sur la pierre aura acquis pour vous une petite part d'humanité souffrante.
 


mercredi 27 novembre 2013

Projet 02081914

Salut les jeunes,

Je vous proposerais bien de travailler avec moi sur le projet "02081914".
Ce projet consiste à découvrir, étudier et documenter le parcours de nos grand-pères, arrière-grand-pères ou proches dans la guerre de 1914, et qui sont partis il y a bientôt 100 ans, le 02 Août 1914 (Jour de mobilisation) pour la grande catastrophe.

En mémoire de ceux qui ne sont pas revenus, et de tous les autres qui sont revenus amochés de corps et d'esprit.

Il s'agirait ensuite de faire vivre la mémoire de ces personnes qui nous sont chères, même si nous ne les connaissons pas bien encore, au travers d'un profil Facebook individuel régulièrement mis à jour de leurs opérations militaires.


Dans ce projet, il y aurait 3 grandes périodes :
1) D'ici Août 2014 :
Identifier les personnes que nous voulons suivre, et prendre connaissance de leur dossier militaire. Créer les profils Facebook correspondants :


2) A partir du 3 Août 2014, et pour la durée de la guerre, renseigner leur Timeline avec ces opérations militaires :



3) Retrouver les amis de nos grands-pères, de la même compagnie et du même régiment par exemple, car des initiatives de ce type vont nécessairement se multiplier :




Evidemment, on peut imaginer impliquer les parents dans cette opération.
Vous en pensez quoi ?

dimanche 17 novembre 2013

Non sanno quello que fanno

Nous avons été voir, hier, le film de Pasolini "Mamma Roma". Un film essentiel d'après le professeur de philosophie de notre lycée, qui y avait donc conduit beaucoup de nos lycéens. J'avais de mon côté invité mes collègues de l'association Dante Alighieri.
La salle de ce vieux cinéma Lapérouse, appelé à se reconvertir ou à disparaître prochainement (à cause de l'arrivée d'un complexe cinématographique flambant neuf en plein centre-ville) était donc pleine. Belle performance pour un film sorti en 1962 .../...

mercredi 16 octobre 2013

Le fondement de la masse

Etienne Klein nous explique dans ce petit exposé de 15 minutes le concept de masse.
Quoi de plus fondamental et de plus inconnu à la fois que la masse ? Un concept ancré sans doute au plus profond de notre cerveau reptilien, à la fois comme masse grave (qui nous fait tomber) que comme masse inerte (qui nous garde dans notre état de repos ou de mouvement). Mais il y a du nouveau, comme en témoigne le lauréat 2013 du prix Nobel de physique Peter Higgs...

mercredi 2 octobre 2013

Donostia

Encore un exemple des structures jacobines de la France, beaucoup plus centralisée que notre voisine l'Espagne.


Qu'est-ce qu'on voit sur cette carte actuelle ? Que la ville de Saint Sébastien en Espagne, San Sebastian en Espagnol, a été rebaptisée au nom local de Donostia, sans doute à la demande de la communauté autonome du Païs Vasco...
En France, la très célèbre ville de St Jean de Luz, "St Jean" pour les estivants ou bourgeois locaux n'a pas été (encore ?) rebaptisée Donibane Lohizune comme il le faudrait pour attester de son appartenance au Labourd... soit la plus belle région du Pays Basque.

samedi 7 septembre 2013

Le Petit Journal - 1 an avant la Guerre

Gardez ce lien :
http://blog.geneanet.org/index.php/category/Chronique-d-une-guerre-annonc%C3%A9e


Ce sont des articles quotidiens du Petit Journal, il y a 100 ans jour pour jour, 1 an donc avant le déclenchement de la Guerre de 1914.

Chronique de la grande catastrophe ...




jeudi 22 août 2013

Histoire d'un peuple

Egypte - Un peuple sans Histoire - 
titrait le magazine spécialisé Herodote.net.

Sans Histoire mais pas sans histoire...
C'est un parti pris de considérer que si un Egyptien est avant tout un fellah, un paysan des bords du Nil, il n'a jamais réussi à diriger son pays. Y a t-il un pays au monde où ce n'est pas le cas ?
Il est bien rare qu’un pays, qui plus est impérial, soit gouverné par ses paysans… Les paysans tiennent la terre de leur pays, l’entretiennent et la cultivent mais l’administrent bien rarement.
Le problème principal du pays est sa pyramide… des âges et sa population qui s’élève beaucoup trop vite, (plus d’un million d’habitants de plus par an) conséquence indirecte des subsides étrangers dont parle l'auteur, qui nourrissent une population qui a dépassé depuis longtemps ce que sa vieille agriculture plurimillénaire peut soutenir !!
Un parti pris mais un point de vue intéressant pour comprendre...

Article relié

vendredi 9 août 2013

Huppe fasciée

Ce matin, un bel oiseau est venu visiter notre pré. C'était un petit migrateur aux belles rémiges bicolores blanc et brun. Il trottait insouciant, picorant le sol, enfonçant ici son long bec recourbé, toujours affairé, toujours en mouvement, industrieux et vif (pour plagier Daudet)...
J'ai voulu savoir le repérer à son chant et voici le bel outil sur lequel je suis tombé : xeno


Portraits de Mères

Un très beau projet photographique :

http://www.abeautifulbodyproject.com/

vendredi 12 juillet 2013

Chocolatine ou Pain au chocolat ?

Quand on commence à entendre Chocolatine à la place de Pain au Chocolat, pas de doute, on arrive dans le Sud-ouest, la preuve avec le site d'un champion de la question :

http://blog.adrienvh.fr/2012/10/16/cartographie-des-resultats-de-chocolatine-ou-pain-au-chocolat/

mardi 4 juin 2013

Paris vaut bien une mairesse

Nous n'aurons donc à Paris que des femmes comme candidates pour l'élection municipale de Mars 2014.
Paris vaut bien une mairesse.

mercredi 29 mai 2013

C'est "Oui"

Deux hommes viennent de se dire "Oui" dans le premier "mariage pour tous" à Montpellier.

Personnellement, j'aurais préféré pour l'esthétique de cette première fois, qu'il se fut agi de deux femmes : J'aurais bien aîmé l'union d'une Marianne et d'une Europe, mais va pour Vincent et Bruno.


En tous cas, par delà les accrocs à la Fraternité, l'Egalité progresse et donc la Liberté sur ses pas.

Right or wrong, my country.
Vive la République, vive la France.

vendredi 19 avril 2013

Cahugate #3

Cette affaire est moche, comme certaines lectrices très prometteuses l'ont tout de suite vu, parce qu'elle dénote une attitude fort pénible de l'individu sus-nommé vis à vis du "Français moyen".

Une attitude dans laquelle ce fieffé félon se dit successivement :

- "Je n'ai même pas besoin de me débarasser par précaution de mon compte en Suisse".

- "Je vais mentir 'droit dans les yeux' à quiconque m'interrogera, le temps nécessaire pour que cette affaire passe"

- "De toutes façons c'est ma parole de Ministre contre celle de quelques journalistes"

Si j'avais le soupçon d'être pris pour un con, quand j'entends aujourd'hui

- "Je suis dévoré par le remords",
alors là, je n'ai clairement plus de doutes.

Conclusion

Au final, j'ai pitié de ce pauvre gars qui a tout perdu.
Surtout si sa propre épouse, avec laquelle il a fait 3 enfants, est (?) impliquée dans sa chute.

Cahugate #2

Un fraudeur en Ministre du Budget ?

Evidemment, choisir un fraudeur en Ministre du Budget, ça surprend en première analyse.

Mais finalement non, au pays de Mandrin.  

N'oublions pas que la "Brigade de Sûreté" de la Préfecture de Police de Paris était (jusque récemment) constituée de repris de Justice, et a même eu à sa tête après la révolution un bagnard (Vidocq).

Le fondement de l'efficacité policière, notamment en termes de fiscalité (mais pas que ...), passe par la connaissance des principes et mécanismes de ce contre quoi on lutte.
 
Alors pourquoi ?

Pourquoi sent-on bien quand même que cette affaire est moche ?

Cahugate #1


A priori :

Est immoral ce qui nuit à un autre individu.
Est salement immoral ce qui nuit à un individu qui n'est pas en état de se défendre, ou est fragilisé (par l’âge par exemple).

A contrario :

Enfreindre une loi n’est pas en soi immoral (c'est "moralement" neutre : on sait juste à quelle "peine" on s'expose).
Dans certaines circonstances, enfreindre la loi est une obligation morale.
Dans certaines circonstances plus graves, respecter la loi est immoral.

Faits :
Fait 1 : Cacher de l'argent à l'étranger, ce n'est pas immoral/amoral, en première analyse.
Fait 2 : Mentir quand on se fait prendre par les journalistes, ce n'est pas non plus a priori immoral.

Conclusion temporaire ex ante :

Cahuzac ne nuit à personne, sauf éventuellement à la personne morale du fisc français, qui pour le coup est en état de se défendre.

En mentant, Cahuzac ne nuit à personne.


Alors pourquoi ?
 
Pourquoi sent-on bien quand même que cette affaire est moche ? 

vendredi 29 mars 2013

Mind your step...

Bienvenue à bord de MSL. Une merveilleuse conférence de Sylvestre Maurice, directeur scientifique français des opérations coordonnées à Toulouse. On est à la conjonction (Mars est de l'autre côté du Soleil, ou à peu près). Le robot ne peut donc plus être piloté pendant 2 ou 3 semaines, ce qui laisse un peu de temps aux scientifiques pour nous expliquer leur exploration lors des quelques 227 premiers sols de cette exploration.

vendredi 22 mars 2013

Merveilleux cerveau humain

Regardez ces vidéo de TED : jaw-dropping comme disent les anglais :

A propos du calcul mental :
http://www.ted.com/talks/arthur_benjamin_does_mathemagic.html

A propos de la mémoire :
http://www.ted.com/talks/joshua_foer_feats_of_memory_anyone_can_do.html

Big Bang

Quelques milliardièmes de milliardièmes de milliardièmes de seconde après le Big Bang, l'Univers passe de la taille d'une tête d'épingle à sa taille presque actuelle.

Le Monde 21/03/2013

Mon Dieu ...

samedi 16 mars 2013

Non ci lo faccio più

Non ci lo faccio più : c'est le constat final et définitif qu'adressait le pape (Michel Piccoli) au psychiatre (Nanni Moretti) dans le film Habemus Papam de ce dernier, à la fois acteur et régisseur. Une phrase toute simple : "je ne me le sens plus", bien naturelle pour un homme âgé qui se voit pourtant investi d'une charge immense. Une phrase qu'aurait pu prononcer Benoît 16 ou le nouveau pape François lors du conclave précédent. Une phrase donc finalement très actuelle, à la fois pleine de l'humanité d'un homme et loin de l'intransigeance habituellement requise pour un pape affublé de la sacro-sainte infaillibilité.
Certains croyants s'en seraient volontiers offusqués. Pour ma part, je la trouve plutôt rassurante : on aurait envie d'embrasser celui qui avoue ainsi sa faiblesse d'homme, obligé d'abandonner sa charge, bientôt sa dépouille de mortel, comme celle peinte par Michel-Ange sur la paroi frontale de la sixtine.
Qu'est-ce que ça enlève au successeur de Pierre ? L'onction divine inhérente au roi ? Sa place à part près du très Haut ? Benoît 16 a parlé de discernement dans sa décision d'abandonner son règne. L'interprétation de Nanni Moretti, ainsi propulsé prophète (bien laïque) était évidemment autre : rendre le pape éminemment humain était sans doute subversif pour l'institution cléricale. Personnellement, je ne le blâmerais pas. Il y avait beaucoup d'intelligence dans le traitement d'un sujet que seul un italien pouvait ressentir aussi justement.

lundi 25 février 2013

La prière du Para

Cette prière a été rédigée par André Zirnheld, un Alsacien dont la famille avait choisi la France en 1870, né le 7 Mars 1913 à Paris, élève au Lycée Saint Jean de Passy.
Il s'est engagé pendant la guerre dans le French Squadron des SAS de l'armée anglaise (Groupe Bergé).
Il meurt le 26 Juillet 1942 en Syrénaique de blessures.


Compagnon de la Libération
Médaille Militaire 
Croix de Guerre 39/45 avec 2 palmes 
Médaille de la Résistance avec rosette

Cette prière a été trouvée dans ses papiers à sa mort, et est connue sous le nom de la prière du Para :

Je m’adresse à vous mon Dieu,
Car vous donnez
Ce qu’on ne peut obtenir que de soi.

Donnez- moi, mon Dieu, ce qui vous reste
Donnez- moi ce qu’on ne vous demande jamais.

Je ne vous demande pas le repos,
Ni la tranquillité,
Ni celle de l’âme, ni celle du corps.
Je ne vous demande pas la richesse,
Ni le succès, ni même la santé.
Tout çà, mon Dieu, on vous le demande tellement,
Que vous ne devez plus en avoir !

Donnez-moi, mon Dieu, ce qui vous reste,
Donnez-moi ce que l’on vous refuse.

Je veux l’insécurité et l’inquiétude,
Je veux la tourmente et la bagarre,
Et que vous me les donniez, mon Dieu,
Définitivement.
Que je sois sûr de les avoir toujours
Car je n’aurai pas toujours le courage
De vous les demander.

Donnez-moi, mon Dieu, ce qui vous reste,
Donnez-moi ce dont les autres ne veulent pas,
Mais donnez-moi aussi le courage,
Et la force et la foi.
Car Vous êtes seul à donner
Ce qu’on ne peut obtenir que de soi.

dimanche 24 février 2013

Lettre posthume qui n'a pas servi

Philippe Baillé est un officier de l'armée française, rentré d’Afghanistan récemment. En 2012, avant de s’envoler pour Kaboul, ce commandant avait écrit une lettre à remettre à son fils en cas de mort au front.

Mon fils, je suis mort d’abord parce que j’ai choisi de m’engager en acceptant que cela puisse arriver. M’engager pour mon pays, pour des valeurs, m’engager tout entier, de tout mon coeur.

Je suis mort car c’est l’accomplissement ultime de la mission, je suis mort car cela fait partie du job. La vie pour un militaire est comme un manteau. On la laisse au vestiaire à l’entrée du spectacle en espérant pouvoir la reprendre en partant… Quelquefois, le spectacle ne se termine pas comme on l’aurait souhaité et le manteau reste au vestiaire… La mort fait partie du paquetage du militaire. C’est pour cela que l’on a une place spéciale dans notre société. Nos dirigeants le savent bien. On le fait librement et volontairement, sans jamais rien dire. Tu dois savoir aussi que ceux qui décident sont toujours critiqués et qu’il est facile de leur faire des reproches. Je sais que nos morts changent nos chefs et que celui qui nous côtoie en est à jamais changé car la mort et la guerre ramènent à l’essentiel.

Alors suis-je mort pour rien? Pour moi, ce "rien"-là est déjà honorable.
Aujourd’hui, les gens sont en quête de tout, ils veulent la gloire, la richesse, la célébrité… Ils veulent le bonheur à tout prix. Moi je ne veux pas de cette "gloire"-là. Je ne veux pas être présenté comme une victime au journal télévisé entre deux approximations. Si tel devait être le cas, je préfère mourir dans l’ombre, dans l’intimité de mon engagement. Aujourd’hui un autre soldat me remplace déjà, je lui ai d’ailleurs transmis le flambeau de ceux qui sont prêts à mourir pour "notre rien".

Je te demande de ne pas en vouloir à celui qui m’a tué, à condition qu’il l’ait fait avec honneur. Si c’est au combat, c’est un soldat qui mérite qu’on le respecte. Si c’est un terroriste prêt à toutes les bassesses pour frapper aveuglément, c’est un lâche qui ne mérite même pas ton mépris. Lui aussi a sans doute un fils et il sait ce qu’il en coûte de priver un fils de son père. Je ne peux pas croire qu’il l’ait fait à la légère. Il ne l’a pas fait pour rien. C’est pour cela qu’il faut être bien sûr du sens que l’on donne à sa vie avant de s’engager dans l’armée. C’est le seul moyen d’éviter que notre rien ne soit vide de sens.

Dernière chose : ta maman, triste mais fière, accepte déjà cet ultime départ loin de vous. Pourquoi? Parce qu’elle le savait, elle l’avait déjà accepté avant même que la mort ne vienne me prendre. Elle m’en avait fait la promesse le jour où on s’est juré d’unir nos destins. Elle te racontera et t’aidera à admettre l’incompréhensible : s’engager pour quelque chose de grand, quelque chose qui nous dépasse.

jeudi 7 février 2013

Un Soldat de la France

Je copie ici un message de Jean Dominique Merchet, journaliste de la défense nationale :

C'est une histoire d'hommes telle que le cinéma les aime. Une belle histoire de camaraderie. Elle se passe dans l'une des unités militaires les plus secrètes du pays, le Centre parachutiste d'instruction spécialisée (CPIS) de Perpignan - l'une des composantes du Service Action de la DGSE. "Denis Allex", otage des djihadistes somaliens depuis 2009, était sous-officier au CPIS.
Plusieurs de ses camarades ont demandé à prolonger exceptionnellement leur contrat au Service Action afin de pouvoir participer à la libération de "Denis Allex". Et plusieurs d'entre eux ont été engagés dans
le raid raté sur Bullo Mareer dans la nuit du 11 au 12 janvier. L'un d'entre eux, F., a été tué au cours des combats. Son corps n'a pas pu être rapatrié et c'est lui que les djihadistes ont ensuite exhibé.
Il avait voulu rester dans son unité pour aller sauver son camarade.
Il est mort en tentant de le faire.
Y-a-t-il plus belle épitaphe pour un soldat ?     


Mercredi 6 Février 2013
Jean-Dominique Merchet

mardi 1 janvier 2013

Vivre à Paris en 1922

Je copie ici un excellent article de Gérard Horny sur Slate, en date du 01/01/2013.
Cet article brasse de manière très claire les concepts de Taux de Change, Taux d'Inflation, et de Pouvoir d'Achat, et d'appauvrissement lié à la guerre.
Une merveille.

Le 4 février 1922, Ernest Hemingway écrit dans le Toronto Star un hymne au plaisir de vivre à Paris, la ville où tout est bon marché. Les hôtels et restaurants qu’il cite méritent toujours le détour, mais ne s’adressent pas vraiment aux petits budgets.
L’écrivain américain ne tarit pas d’éloges sur Paris. C’est tout ce que voulez (la pluie, le froid, le bruit, la bousculade, etc.), mais c’est bon marché.
«Au cours actuel du change, un Canadien peut vivre confortablement et agréablement à Paris avec un revenu annuel de mille dollars
Et il donne des exemples très concrets de ses propres dépenses.
Son hôtel? Confortable, rue Jacob, dans le quartier de Saint-Germain des Prés. La chambre lui coûte 12 francs par jour à deux (il est accompagné par sa première femme, Hadley Richardson, qu’il a épousée cinq mois plus tôt), soit 30 dollars par mois. Le petit déjeuner leur revient à 2,50 francs pour tous les deux, soit un total de 75 francs ou 6 dollars et quelques cents par mois.

Et une bouteille à 60 centimes, une!

Le restaurant? Presque en face de l’hôtel, au coin de la rue Jacob et de la rue Bonaparte.
Dans ce restaurant «splendide», nous dit Ernest, une soupe coûte 60 centimes et un poisson 1,20 F. Pour les plats de viande (rosbif, côtelettes de veau, agneau, mouton et steaks «épais, servis avec des pommes de terre cuisinées comme seuls les Français savent le faire», c’est 2,40 francs. Le prix des légumes (choux de Bruxelles, choux-fleurs, épinards, petits pois), varie entre 40 et 85 centimes. La salade est à 60 centimes, les desserts à 75 centimes ou 1 franc. La bouteille de vin rouge est à 60 centimes et le verre de bière à 40 centimes.

Ainsi les deux jeunes mariés dépensent 50 cents chacun pour faire «d’excellents repas dans ce restaurant, comparable par la cuisine et la qualité des aliments aux meilleurs restaurants d’Amérique». Et ce n’est pas tout: après le dîner, on peut prendre le bus ou le métro et aller où on veut pour 4 cents. N’est-ce pas merveilleux?

Nous aussi, en relisant ces lignes, nous sommes tentés de croire que 1922, c’était encore la belle époque. Ah, vivre à Paris pour des sommes aussi dérisoires, ce devait être prodigieux! Oui, effectivement, ce l’était, mais pas pour tout le monde.

Le change est une chose merveilleuse

Il faut d’ailleurs reconnaître à notre ami Ernest une grande honnêteté intellectuelle. D’entrée de jeu, il prévient:
«Un Canadien avec 1.000 dollars pour l’année peut vivre très confortablement et agréablement à Paris. Mais si le taux de change était normal, il mourrait de faim
Et plus loin, il ajoute:
«Le dollar, qu’il soit canadien ou américain, est une clé qui vous ouvre Paris. Avec un dollar américain qui vaut 12,50 francs et un dollar canadien coté à un peu plus de 11 francs, c’est une clé très efficace (…). Le change est une chose merveilleuse
Comme on le comprend. Il est arrivé en France à une période bénie pour un Américain. Les pays européens étaient sortis de la Première Guerre mondiale exsangues, en proie à l’inflation et lourdement endettés. Leurs monnaies étaient faibles.
Dans certains cas, comme celui de l’Allemagne, ce fut un véritable effondrement. Un dollar valait 4,2 marks en 1914, 8 marks en 1918, 60 marks en juin 1921, 30.000 marks en janvier 1923 et... 4.200 milliards de marks en novembre de la même année.
Dans le cas de la France, ce fut une simple chute: le dollar des Etats-Unis valait 5,61 francs en 1918; il est monté à 14,31 francs en 1920. Il est un peu revenu en arrière au moment où Hemingway est arrivé en France (13,49 francs en moyenne en 1921 et 12,33 en 1922), mais il est reparti à la hausse à 16,58 dès 1923. Il a fallu attendre 1926 et le retour de Raymond Poincaré pour que le franc se stabilise. En 1928, la dépréciation de notre monnaie était officialisée par une baisse de 80% de sa valeur théorique en or: c’est ce qu’on a appelé le franc à quatre sous. Pas de chance pour la France: elle a eu un franc relativement fort au début des années 1930, alors que tous les pays se battaient pour avoir une monnaie faible et soutenir comme ils le pouvaient leurs exportations...

Les Français, eux, se serraient la ceinture

Mais ce qui était bon pour les étrangers ne l’étaient pas forcément pour les Français. Car, du fait de l’inflation, la valeur interne du franc fléchissait rapidement alors que les salaires ne suivaient pas.
Si l’on se fie aux calculs de l’Insee, qui permettent de suivre le pouvoir d’achat du franc puis de l’euro au fil des ans, 1 franc de 1914 équivalait à 3,24 euros d’aujourd’hui, il n’en valait plus que 1,57 en 1918 et 1,06 en 1921.
Si les journalistes américains pouvaient mener grande vie à Paris, les Français, eux, se serraient la ceinture.

Certes, le coût la vie à l’époque paraît peu élevé. Mais cela est vrai si l’on juge les prix d’alors selon nos critères d’aujourd’hui. Une chambre à 12 F par jour, cela fait 12,69 de nos euros. Un petit déjeuner pour deux à 2,50 F, cela fait 2,64 euros. Un repas à 50 cents, soit 5,5 F, cela ne fait guère que 5,81 euros.
Mais plusieurs points sont à considérer. D’abord le niveau de vie s’est beaucoup élevé entre-temps: la simple conversion des prix de l’époque en euros de 2011 ne permet pas de comprendre ce que signifiaient ces prix pour les Français de 1921 ou 1922.

Ensuite, les exigences du consommateur ne sont plus les mêmes: Hemingway s’estimait très heureux d’avoir trouvé une chambre avec eau froide et eau chaude et une salle de bains sur le même palier. Aujourd’hui, il exigerait évidemment d’avoir la salle de bains avec la chambre. Enfin, le quartier de Saint-Germain des Prés a considérablement changé en quatre-vingt-dix ans. Ce n’est plus là que l’on va pour se loger et se restaurer à bon compte.

A l’Hôtel d’Angleterre, demandez la chambre 14

En bon journaliste, Ernest ne fait pas de publicité: il ne cite pas les noms des établissements qu’il a fréquentés. Mais les indications qu’il donne sont suffisamment précises pour qu’on puisse les retrouver.
La chambre 14 de l’Hôtel d’Angleterre où il est descendu le 21 décembre 1921 à son arrivée à Paris coûte aujourd’hui 270 euros la nuit petit déjeuner inclus (elle est très demandée par tous les touristes américains de passage à Paris qui souhaitent dormir dans la même chambre que le grand écrivain).
Quant à son restaurant favori, il s’agit du Pré aux Clercs, toujours agréable et de qualité, mais à des prix qui n’ont rien d’exceptionnellement bas. En prenant à chaque fois le premier prix, avec une entrée à 8 euros, une bavette à 14 euros et un dessert à 7 euros, le tout accompagné par une bouteille de vin (pour deux !) à 22 euros, on s’en sort à 40 euros par personne.
Ernest et Hadley Hemingway en 1922 à Montreux            
On peut trouver une autre illustration des changements qui se sont produits à Saint-Germain des Prés dans la comparaison avec d’autres hôtels de la capitale. Hemingway raconte qu’il a retrouvé par hasard au jardin du Luxembourg deux Américaines qui avaient fait le voyage avec eux et étaient descendues dans un de ces grands hôtels pour touristes du quartier de l’Opéra et de la Madeleine. Elles avaient payé leur chambre 60 F par jour (63,43 euros de 2011); pour deux jours et trois nuits, elles y avaient dépensé 500 F (528,60 euros), soit autant que pour deux semaines dans l’hôtel de la rive gauche où elles étaient descendues ensuite.

Paris n’est plus le paradis, même pour les Canadiens

L’écart aujourd’hui ne serait plus le même: même s’il ne faut pas compter loger à deux au Grand Hôtel Intercontinental, entre la rue Scribe et la place de l’Opéra, à moins de 340 euros la nuit (au tarif officiel), l’écart avec un bon hôtel de la rue Jacob s’est considérablement réduit.
Et une chose est sûre: avec un dollar canadien qui vaut aujourd’hui environ 0,76 euro, vivre confortablement et agréablement à Paris avec un revenu annuel de 1.000 dollars est définitivement exclu.

Remarquons tout de même que malgré les prix si intéressants des hôtels et restaurants d’alors, Ernest Hemingway et son épouse avaient préféré dès janvier 1922 louer un appartement dans le Ve arrondissement, rue du Cardinal-Lemoine. La vie de château n’a eu qu’un temps.