Mettre de l'huile sur le feu et provoquer avec un nouveau dessin rageur ne fait que désigner notre pays aux yeux du monde et des foules qui ne voient évidemment pas l'intention. Je pense qu'on aurait plutôt besoin de réconfort en ce moment. Cherchons la concorde, à l'intérieur comme à l'extérieur de notre France, encore une fois bafouée.
vendredi 30 octobre 2020
Je ne suis pas Charlie
lundi 26 octobre 2020
Corona 25/x : 2nd wave
La seconde vague de corona en France, qui a atteint et dépassé le premier million de cas positifs :
Comme en 1919, et malgré tous les efforts faits par les uns et par les autres, la vague d'automne semble vouloir tout emporter sur son passage... Le mois de novembre à venir semble terrifiant sur le plan sanitaire.
dimanche 25 octobre 2020
Le noeud de Conway est non bordant !
Si vous attendiez la réponse à cette question depuis 50 ans qu'elle était ouverte dans le monde des mathématiciens, alors voici enfin une réponse pour vous :
Fascinant !
mardi 20 octobre 2020
Chers concitoyens musulmans
Pierre Jourde écrit quelque chose de très touchant :
Chers concitoyens musulmans,
Ne nous voilons pas la face : il y a un problème. Tant de morts, tant de souffrances pour de simples caricatures. Comment en est-on arrivés là ?
A la fin du Moyen-Âge, tous les pays chrétiens et musulmans vivaient sous le même régime d’intolérance. Un simple soupçon de blasphème ou d’impiété pouvait vous mener à l’échafaud. Les gens des autres religions ne disposaient pas des mêmes droits et étaient à peine tolérés. On peut même dire que les pays musulmans, l’empire ottoman en particulier, étaient un peu plus tolérants envers les juifs et les chrétiens que les pays chrétiens ne l’étaient envers les juifs et les musulmans.
Et puis, en Europe, il s’est passé deux phénomènes, étroitement liés, qui ont fait la société où nous vivons aujourd’hui, la France, et plus généralement les pays occidentaux : la naissance de l’esprit scientifique et la philosophie des lumières. Cela a mis quatre siècles pour aboutir, du XVIe siècle au début du XXe siècle, le travail a été long, douloureux et sanglant. Au bout de ce travail, il y a, entre autres, le droit au blasphème.
L’esprit scientifique a cherché à expliquer rationnellement le monde, par l’observation et la logique, sans s’en tenir aux vérités religieuses. Il a d’abord fallu faire admettre aux autorités chrétiennes que la terre tournait sur elle-même et autour du soleil. Galilée a été obligé par l’Eglise de renoncer à ses découvertes. Au XIXe siècle encore, les découvertes de Darwin étaient refusées au nom de la Bible. Mais l’esprit scientifique a fini par s’imposer. Grâce à lui, on en sait plus aujourd’hui sur l’univers, l’homme et la nature. Mais il a aussi permis l’essor technique : si vous avez un téléphone portable, la télévision, une voiture, la lumière électrique, si vous prenez l’avion, le train, si vous pouvez vous faire vacciner, passer une radio, c’est grâce au développement de l’esprit scientifique tel qu’il s’est développé en Europe, et qui a dû lutter des siècles contre la religion et ses soi-disant vérités révélées.
L’esprit des lumières s’est opposé aux persécutions religieuses, au fanatisme religieux, à la superstition. Voltaire a lutté pour faire réhabiliter Calas, condamné à l’atroce supplice de la roue, parce qu’il était protestant et qu’on le soupçonnait d’avoir tué son fils parce qu’il voulait se convertir au catholicisme. Voltaire a lutté pour faire réhabiliter le Chevalier de la Barre. Ce garçon de vingt ans est torturé et décapité pour blasphème. On lui cloue sur le corps un exemplaire du Dictionnaire philosophique de Voltaire et on le brûle.
La Révolution française, puis les lois de la laïcité, qui s’imposent à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, vont dans le même sens : empêcher la religion catholique, qui est pourtant celle de l’immense majorité des Français, d’imposer sa vérité, son pouvoir, de torturer et de tuer pour impiété ou pour blasphème, et faire en sorte que toutes les religions aient les mêmes droits, sans rien imposer dans l’espace public. Car c’est cela, la laïcité.
Mais le catholicisme n’a pas abandonné si facilement la partie, même après avoir perdu le pouvoir, il voulait encore régner sur les esprits, censurer la libre expression, imposer des visions rétrogrades de l’homme et, surtout, de la femme. En 1880, puis encore en 1902, il a fallu expulser de France tous les ordres religieux catholiques qui refusaient de se plier aux lois de la république. Pas quelques imams : des milliers de moines et de religieuses. Ça ne s’est pas passé sans résistance et sans violences.
La critique, la satire, la moquerie, le blasphème ont été les moyens utilisés pour libérer la France de l’emprise religieuse. Tant que la religion était religion d’état, ceux qui le faisaient risquaient leur vie. Puis l’Eglise catholique a fini par accepter d’être moquée et caricaturée. Elle a accepté les lois de la démocratie. Les caricatures et les blasphèmes étaient infiniment plus durs et plus violents que les caricatures assez sages de Mahomet, chez les ancêtres de Charlie Hebdo, qui s’appelaient par exemple L’Assiette au beurre, et plus récemment, il y a une cinquantaine d’années, Hara-Kiri, et de nos jours dans Charlie Hebdo, beaucoup plus durs avec le Christ qu’avec Mahomet. Imaginez qu’un artiste comme Félicien Rops représentait le Christ nu, en croix, en érection, avec un visage de démon ! Et « Hara-Kiri » la sainte vierge heureuse d’avoir avorté ! Personne ne les a assassinés. Au contraire, en 2015, une revue catholique a publié des caricatures du Christ par Charlie Hebdo ! Pour montrer qu’ils étaient capables de les accepter.
Si vous êtes libres de pratiquer votre religion en France, si vous avez les mêmes droits que les chrétiens, c’est grâce au blasphème, qui a empêché une religion d’imposer sa loi. Les musulmans sont redevables de leur liberté aux blasphémateurs.
Beaucoup de gens aujourd’hui refusent l’idée de blasphème, pas seulement les musulmans. Il faudrait « respecter » les religions. Mais c’est justement parce qu’on ne les a pas respectées que nous sommes libérés de l’emprise religieuse, et que nous vivons en démocratie, dans un pays où toutes les religions sont acceptées. Charlie Hebdo ne va pas trop loin, Charlie Hebdo fait avec courage son travail de journal satirique, qui s’en prend à tout le monde, sans distinction de religion ou d’origine, parce qu’en démocratie on a le droit de se moquer de tout et de tout le monde. Sachez que Charlie Hebdo, qui est plutôt classable à l’extrême gauche, s’en est pris au racisme, à l’extrême droite, au christianisme, aux hommes politiques de tous bords. Et à l’islam, donc, à égalité avec les autres. Pourquoi auraient-ils dû faire une exception uniquement pour l’islam ?
En France, on peut critiquer avec virulence tout le monde, les partis politiques, les institutions, les hommes politiques, les artistes, etc. Faut-il faire une exception pour les religions ?
En France, on peut moquer le catholicisme, le judaïsme, le bouddhisme, sans risquer sa vie. Pourquoi ne peut-on moquer l’islam sans risquer sa vie ? L’islam serait-il une exception ?
L’islam peut être critiqué et moqué, comme toutes les autres religions, comme toutes les croyances, comme toutes les opinions, car en démocratie, une religion est une opinion, elle n’est pas sacrée. Si vous n’admettez pas cela, alors vous n’admettez pas la démocratie. Cela signifie que vous souhaitez vivre dans une société sans liberté d’expression, où on ne critiquera plus rien ni personne, dans une société sans blasphème, où la religion dictera aux gens leur manière de vivre, les limites de leur comportement et de leur parole. C’était la France au Moyen-Âge. C’est l’Arabie saoudite aujourd’hui.
L’islam est critiquable justement parce qu’il a encore du mal à accepter la liberté d’expression et la liberté des femmes. Connaissez-vous des massacres et des attentats de même ampleur, partout dans le monde, au nom du christianisme ? L’islam est la seule religion aujourd’hui au nom de laquelle on tue des centaines d’innocents partout dans le monde. Combien de massacres en France, l’Hyper Cacher, Charlie Hebdo, le Bataclan, le carnaval de Nice, les petits enfants juifs tués par Mohammed Merah, le professeur de Conflans, et bien d’autres encore ? Combien d’attentats aux Etats-Unis, en Espagne, en Angleterre, en Belgique, tous aux cris de « Allah est grand » ? Et les organisations totalitaires islamiques, comme Daech, Al Qaïda, les Tribunaux islamiques somaliens ou les Talibans, qui lapident, décapitent et crucifient au nom d’Allah les chrétiens, les musulmans chiites, les juifs, les zaïdites, les homosexuels, les femmes adultères et les blasphémateurs ? Et dans combien de pays islamiques les autres religions sont-elles persécutées, les femmes considérées comme mineures, des jeunes gens exécutés pour n’avoir pas respecté la religion?
Ces pays et ces gens ont manqué la révolution scientifique et l’esprit des lumières. Ils ont manqué de blasphème !
Critiquer l’islam n’est pas de l’« islamophobie », maladie imaginaire créée pour empêcher justement toute critique, encore moins du racisme, qui n’a rien à voir. Est-ce que critiquer l’extrême droite est de l’extrême-droitophobie ? Est-ce que critiquer le capitalisme est de la capitalistophobie ? Est-ce que critiquer le catholicisme est de la catholicismophobie ?
Critiquer l’islam, c’est le mettre sur le même plan que toutes les autres religions et opinions. C’est donc le respecter. Ne pas le critiquer, c’est penser qu’il est incompatible avec la démocratie, comme on préserve la sensibilité d’un petit enfant qui ne peut pas endurer la même chose que les adultes.
Les caricatures de Charlie Hebdo, celles des journaux danois, attaquaient l’islam justement sur le sujet de la violence et de l’intolérance. Et c’est bien un problème, ne le pensez-vous pas ? Les réactions violentes ont montré qu’ils avaient raison ! Les assassins de Charlie Hebdo démontrent qu’ils avaient raison, qu’il y a là un problème. Le jour où l’islam acceptera de se confronter à ses problèmes au lieu de tout renvoyer à l’islamophobie, le jour où il acceptera de rire de lui-même, et de prendre la moquerie avec une indulgence souriante, il montrera qu’il est compatible avec la démocratie, capable d’autocritique, comme l’a été le catholicisme. Ce jour-là, une simple petite caricature ne donnera plus lieu à des massacres.
Je souhaite vivement, je ne sais par quel canal, être entendu de vous, surtout ceux que choquent les caricatures. Qu’ils comprennent enfin que c’est la loi démocratique, que c’est au prix de cette insolence qui réveille les esprits qu’on peut réfléchir, se remettre en question et avancer. Et si les religions avaient enfin de l’humour ?
Si la Grande Mosquée de Paris organisait une expo Charlie Hebdo ?
On peut rêver…
samedi 17 octobre 2020
L'histoire en marche
Le mot "couvre-feu" est effectivement un mot dramatiquement chargé, comme nous le rappelle une simple affiche accolée dans une rue du XIVème :
Je suis Enseignant clairement.
Je reprends le très beau texte de Luc Le Vaillant dans Libé ce jour, tout y est dit :
Il faut dire l’abjection, et essayer de ne pas désespérer. Il faut pleurer Samuel Paty, professeur de collège, décapité par un terroriste islamiste, et essayer de ne pas désespérer de la nature humaine, de ses dévotions indignes, de ses croyances insupportables, de ses agenouillements abrutis.
Il faut saluer la grandeur d’un enseignement dispensé pour éclairer les consciences, et essayer de ne pas désespérer de parents d’élèves qui, pour des raisons religieuses, contestent la connaissance et le savoir, la raison et la libre pensée, le droit au blasphème et à la satire.
Il faut se convaincre que les fondamentalistes musulmans, leurs tueurs sanguinaires et les pousse-au-crime qui rôdent alentour peuvent être renvoyés dans les limbes d’où ils n’auraient jamais dû sortir. Et il faut essayer de ne pas désespérer de la tolérance démocratique que nous devons maintenir coûte que coûte, de la bienveillance laïque qui est due aux plus obscurantistes d’entre nous.
Un tueur, agissant au nom d’Allah, a décapité un enseignant parce qu'il avait montré et commenté des caricatures de Mahomet lors d’un cours sur la liberté d’expression. Il n’est pas neutre que Samuel Paty ait été en charge d’enseigner l’histoire. L’histoire est un processus évolutif, ce n’est pas une vérité révélée. L’histoire est pleine de bruit et de fureur, mais elle a des lignes de force et des lignes de crête, une chronologie qui n’empêche pas la mise en perspective et la remise en cause, au contraire. L’histoire n’est pas dieux et diables, paradis et enfer, bien et mal, vices et vertus. L’histoire est d’autant moins une Bible ou un Coran, que ce n’est pas une voie unique ou une morne plaine.
Ensuite, les religions, comme l’histoire, sont des créations humaines, des récits des origines, des champs de forces symboliques. La différence tient au fait que les religions sont des systèmes clos et des dispositifs idéologiques qui visent à régenter l’ensemble des comportements humains -éducation, nourriture, sexualité, procréation, etc. L’histoire, elle, s’essaie comme elle peut à raconter les hommes depuis qu’ils sont hommes. Elle dit comment ils se sont affrontés, entretués, aimés. Elle dit comment ils ont changé, grandi, bâti, et comment parfois ils régressent, périclitent, disparaissent.
Dans sa revendication de l’attentat, le jihadiste aurait présenté Emmanuel Macron comme le «dirigeant des infidèles». Si l’on veut essayer de ne pas désespérer, il faut se féliciter d’être désignés à la vindicte meurtrière comme des infidèles. Cela signifie que nous sommes des individus émancipés que n’encagent pas des soumissions archaïques à des idoles abusives. Cela signifie que nous choisissons nos fidélités et que nous avons le droit de les révoquer, car nous sommes bien conscients que l’éternité n’est pas de ce monde. Cela s’appelle la démocratie ou le divorce, ce dernier n’ayant rien à voir avec la répudiation. Ce droit à l’infidélité signifie que l’apostasie m’est permise, si jamais, que Dieu m’en garde, il m’arrivait de croire, au lieu de ne pas croire.
Devant le collège de Conflans, triturant son masque noir entre ses doigts, visage moite d’émotion et de colère, Macron a répété par deux fois: «Ils ne passeront pas.» Le citoyen que je suis a apprécié, espérant qu’il ne soit pas trop tard, tant l’acceptation d’un concept comme celui d’«islamophobie» peut entraver la nécessaire critique de toutes les religions. En revanche, l’historien que je ne suis pas vraiment a de quoi s’inquiéter. La reprise de ce slogan républicain jeté à la face des partisans de Franco pendant la guerre d’Espagne est un magnifique cri de résistance antifasciste et libertaire. Malheureusement, ceux qui hurlaient «viva la muerte» l’ont emporté et le joug du franquisme a mis longtemps à être levé.
Il faut saluer la mémoire du professeur assassiné et faire le nécessaire pour que l’Education nationale puisse continuer à enseigner paisiblement le Big Bang et Darwin, la reproduction sexuée et la natation, aux filles comme aux garçons, de toutes origines, de toutes confessions. Afin d’essayer de ne pas désespérer.