Le fonctionnement des écosystèmes, spécialement dans les domaines industriels à forte composante informatique, a beaucoup changé, au cours des dernières décennies.
Le bon vieux paradigme de la compétition industrielle à
l’ancienne, dans lequel chaque acteur cherchait à gagner, d’année en année, des
parts de marché sur la concurrence, dans des marchés relativement stabilisés,
est révolu.
A l’époque, les marchés étaient cantonnés à des envergures
nationales. Un service commercial qui décidait d’attaquer un nouveau marché
étranger, commençait par étudier de manière fine les spécificités locales,
notamment les aspects juridiques, et établissait un cahier des charges de
spécificités locales, dans le but d’adapter le produit maison à ce nouveau
marché. Ensuite, des commerciaux locaux étaient embauchés, dans une structure
juridique locale créée pour l’occasion, pour sillonner le terrain, et présenter
le produit aux indigènes dans leur propre langue. Si le nouveau marché
s’établissait bien, on envisageait, à terme, d’ouvrir une usine de fabrication
dans le pays même, pour rapprocher la fabrication du produit de ses consommateurs
locaux.
D’année en année, les prix des produits avaient tendance à
baisser, des investissements industriels réguliers étant faits pour augmenter
la productivité, améliorer les processus de production, et au final abaisser
les coûts de production. C’est ainsi que l’on agrandissait son marché, en le
rendant plus accessible à plus de consommateurs potentiels.
Les ouvriers, contremaitres et ingénieurs qui travaillaient
dans les usines développaient une vraie expertise, avec les années. Ils
fondaient une famille et élevaient des enfants, souvent ancrés pour plusieurs
générations dans le tissu local de la ville.
Le patron disposait d’une belle fortune à la fin de sa vie, soit en vendant son usine à un grand groupe, soit en la cédant à ses enfants, qui pouvaient parfois à leur tour faire leur vie comme patron, parfois.
Mais maintenant
Mais maintenant, les conditions des marchés ont dramatiquement changé, bouleversant le fonctionnement de la société, qui n’avait vraiment pas besoin de ça, avec les catastrophes écologiques qui s’accumulent.
Winner takes all
Un marché concurrentiel n’a plus vraiment le temps de
s’établir : Très rapidement, dans chaque marché de nouveaux produits, un
acteur seulement domine le marché au point d’en rafler l’essentiel de la valeur
ajoutée. Son produit n’est pas vraiment meilleur que celui des concurrents
étrillés, sur le plan technique, l’engouement de la demande se fondant sur des
critères très subjectifs comme un design réussi, ou un marketing très actif.
Formation du prix aberrante
Du coup, cet acteur « very much in the demand » n’a aucune motivation
à faire baisser son prix de vente. Au contraire, il est normal pour lui de
s’efforcer de monter en gamme, et donc en prix, de manière continue. Ainsi,
assez rapidement, le produit en question devient un produit de luxe, réservé à
une population d’afficionados (appelés geeks depuis le XXième siècle), qui
suivent les yeux fermés, faisant fi de l’obsolescence réelle du produit, et
achetant tous les ans, par pur snobisme, le produit dans son nouveau millésime.
Rupture avec le travail
Les produit technologiques en question ont nécessairement une très forte
composante informatique : tout est informatique au XXIème siècle. Les
voitures électriques, qui vont progressivement remplacer les voitures diesel ou
essence, ne représentent plus un chef d’œuvre de mécanique et éventuellement
d’électronique comme dans les années 2000. Elles sont réduites à un gros moteur
électrique (simplissime sur le plan mécanique) et une immense puissance de
calcul algorithmique (pour le logiciel d’auto conduite par exemple). Du coup,
comme dans tout produit informatique, il est le fruit du travail d’une équipe
très réduite, qui sera en mesure de dupliquer à l’infini son
« code », sans construire vraiment de cosme, même micro : Une
killer-app sera habituellement fabriquée par une équipe de moins de 1000
informaticiens, et sera utilisée dans le monde entier à des millions, voire des
milliards d’exemplaires.
Mais tous ne rêvent que de s’acheter le futur IPhone 27 surfacturé, qui permet de regarder une vidéo en très haute qualité dans l'ascenseur d'un parking souterrain.